Théorie générale de la Révolution
Michel BakounineIl y a plusieurs raisons à cela. De son vivant, Mikhaïl Alexandrovitch n’a publié que dix-sept titres, dont trois seulement dépassent les cent pages (l’Empire knouto-germanique et la Révolution sociale, la Théologie politique de Mazzini et Etatisme et anarchie) ; les autres, restés à l’état de manuscrits, ne purent donc être remaniés par l’auteur lorsque l’on songea enfin à les imprimer. Le plus souvent, ses écrits étaient des textes de circonstance (articles, pamphlets, brochures...), composés à la diable -entre une conspiration et un expédient pour trouver de l’argent-, souvent sous la forme de lettres dans lesquelles il interpelle ses adversaires, implore ou encourage ses amis. Les répétitions et digressions y abondent ; des pans entiers de textes plus anciens y sont recyclés ; tous défauts encore aggravés par le goût de l’auteur pour les phrases à rallonge.
Sans doute, tant à l’écrit qu’à l’oral, la parole de Bakounine précédait-elle la pensée, l’impulsion la réflexion, et ce n’est pas toujours littérairement dommageable, quand le désordre de plusieurs de ses textes ne les a pas prémunis contre la critique impitoyable du temps. Il reste quand même des fulgurances, des développements lumineux, des prévisions étonnantes, qui justifient leur réédition et indiquent aussi que l’aura dont disposait le « géant russe » (1,97 m) auprès de ses contemporains ne reposait pas que ...
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